Intime-Moi (2022 / extraits)

Série complète visible sur demande. Contactez-moi.

"Intime-Moi" est une écoute...écouter son corps transmettre, converser avec notre environnement, vibrer avec les éléments naturels et exprimer sa nature et son état au-delà des mots...l'intime portrait de soi - de moi - à travers la peau nue, qui place le photographe qui se regarde à cette double place de sujet et d'observateur.

C'est aussi la proposition d'une lecture multiple qui confronte le regardeur à sa propre intimité. Que voit-il de moi ? De lui ? Quelle vitale émotion vient percuter en lui cette projection sensuelle face à une scène qu'il n'est pas censé voir ? Quels jugements, quels clichés se mettent en place, qu'est-ce que cette vision vient révéler de soi, qu'est-ce que cette expérience corporelle qu'il vit à son tour raconte de son intime perception de l'autre ?

Nous sommes en permanence, à chaque seconde, en intimité avec nous-même. Nos émotions, nos sensations, nos rêves, nos désirs, nos pulsions, notre sexualité, notre corps qui réagit, transmet et incarne notre "très intérieur" dans l'espace commun de conversation avec l'extérieur dans son sens le plus large. Cet espace privé et secret censé n'être partagé qu'avec un nombre très restreint d'individus ... mais souvent personne d'autre que nous-même pour la plus grande partie de cet intime état en mouvance perpétuelle et continue.

Un rapport à soi que la société veut de plus en plus s'approprier, une intime conversation que nous avons de plus en plus l'injonction de partager. Mais pas trop. Il ne faudrait pas devenir dérangeante.

Vivre sereinement sa propre intimité est déjà toute une affaire quel que soit son genre, une intimité qu'en tant que femme il devient pratiquement politique de désigner, de qualifier, de confronter. D'exposer. De justifier. Un dilemme permanent et personnel qui devient un enjeu collectif, chaque jour percuté par de nouvelles prises de pouvoir qui insufflent - ou pas - le droit à être soi, tout en ménageant les projections des uns et les fantasmes des autres sur des corps qui ne leurs appartiennent pas, des désirs normés, une sexualité double face qu'on voudrait regarder en cachette en se défendant de vouloir la vivre. Un voyeurisme permanent qui condamne celles et ceux qui osent affirmer leur identité propre au milieu du carnage imposé par des codes de plus en plus étroits, intransigeants, et qui sans cesse violentent la sphère de l'intime sous couvert de la mettre en valeur ou de la protéger, parce que "c'est bon pour nous".

L'image, et la photographie en particulier, sont devenus les nouveaux "porteurs de bonne parole". Loin d'être fictionnelle, la proposition photographique qui vient qualifier l'intime participe à la définition de notre société future, façonne les valeurs communes et pose une vision. Une vision propre à chaque photographe par définition, mais qui devient, aujourd'hui encore plus qu'avant, un socle sociétal par extension.

Alors, je veux croire que la nature du propos défendu en tant que photographe, et encore davantage en tant que femme photographe, est importante. Confronter les jeux de pouvoir qui veulent de plus en plus s'immiscer dans le privé. Rendre à l'humain ses rêves et ses désirs en le mettant face aux schémas politiques inconscients ancrés dans l'intimité de leur conscience charnelle. 

"Intime-Moi" se veut être une mise en perspective de cette injonction extérieure du regard de l'autre sur soi à travers l'expression photographique la plus intime qui soit : l'autoportrait nu, en double exposition dans des décors qui m'ont fait vivre des émotions et ont participé à ma vie intime, qu'elle puisse être artistique, élémentale, sensuelle ou simplement en recherche d'autre chose que moi. Participer au débat de société en cours en questionnant cette valeur de l'intime en chacun, et ce droit à dévoiler - ou pas - notre propre rapport au monde.